Bébé étoile ou le réflexe de radiation du centre

Introduction

La naissance peut être décrite comme un moment de rupture qui signe pour le bébé et la mère la fin d’un état et le début d’un autre. Au cœur de ce véritable changement de paradigme, se cachent néanmoins des éléments qui témoignent d’une forme de constance, de prolongement entre la période fœtale et la période néonatale, en termes de circulation hormonale, de milieu bactérien, d’états de conscience mais aussi du point de vue de l’expression des réflexes archaïques et de la stimulation ombilicale. Le bébé ne naît pas vierge de perceptions sensorielles et d’expériences motrices. Il est en recherche et en demande de stimuli familiers après sa naissance, ce qui facilite sa transition métabolique. In-utero, les réflexes sont en plein développement; ils préparent le terrain pour tous les modèles de mouvements volontaires à venir. Les réflexes s’organisent autour d’un patron moteur sous-jacent : la radiation du nombril, qui fera l’objet de cet article et dont je développerai principalement l’implication au sujet de l’allaitement maternel. Cette organisation motrice primaire a la fonction d’un canevas ; c’est un mécanisme qui permet au bébé d’établir la connexion centre-périphéries et d’utiliser ses réflexes du tronc (dos, hanches, cou) et des extrémités (pieds, mains, visage) de manière équilibrée pour prendre le sein. Pour les professionnels, la compréhension de la théorie de la radiation du centre permet d’accompagner les mères en favorisant son expression, afin de simplifier le démarrage de l’allaitement chez le bébé né a terme en bonne santé mais aussi chez le bébé légèrement prématuré. Réciproquement, cet éclairage nous propose de placer l’allaitement maternel (surtout lorsqu’il comprend un contact ventral étroit), comme facteur de prévention pour un bon déploiement de la radiation du centre chez le bébé, avec des incidences sur la maturation de bon nombre d’autres réflexes. Plus globalement, la théorie de la radiation du centre permet d’ élargir nos observations et notre manière d’appréhender l’allaitement maternel. Je vous propose de vous pencher un instant sur le processus d’interaction corporel mère/bébé, qui repositionne avant tout l’allaitement comme une relation, une forme de langage tactile spécifique à la mère et au bébé à ce moment de leur vie, plutôt que de rester focalisés sur le “résultat”  comme il est parfois coutume (bon transfert de lait, prise de poids du bébé). Car quand le processus physiologique est protégé, il n’est plus nécessaire d’évaluer, de quantifier, ni d’enseigner…

A-gravité

La croissance de l’embryon s’organise autour de son tube digestif, qui le traverse de part en part. Aux extrémités se trouvent deux muscles orbiculaires, la bouche et l’anus. Le fœtus(1) est relié à son placenta par l’intermédiaire de son cordon ombilical qui est attaché au centre de son corps (nombril). Le point d’attache de son « fil de vie » représente le centre de son monde, son point d’ancrage, c’est la référence kinesthésique(2) du fœtus. Son organisation motrice est sphérique, tous ses mouvements s’organisent à partir de son centre. Nous pouvons considérer son corps comme une roue, son nombril comme le moyeu de la roue, sa tête et ses membres comme les rayons de la roue, c’est pourquoi je nomme parfois la radiation du centre rayonnement du nombril. L’intranaute(3) évolue dans un milieu aqueux, « océanique », hors de la présence de la gravité. Il est enveloppé de plus en plus étroitement de toutes parts, au fur et à mesure de son voyage. Il est relié à son ancre qui lui fournit en continu toute la nourriture dont il a besoin.

Fondations réflexes

Les réflexes archaïques se développent progressivement(4) et s’exercent durant toute la période intra-utérine, ce qui permet au fœtus d’activer et de coordonner certains mécanismes (musculaires, vestibulaires, tactiles, moteurs) qui lui serviront durant sa naissance, et plus tard pour l’adaptation au monde aérien. Le développement de ces réflexes se greffe sur la première grande organisation corporelle archétypale(5) (proprioceptive(6) et motrice) : la radiation du centre. Elle est la « toile de fond » sur laquelle l’émergence et l’expression des réflexes archaïques s’organisent.

Voyons de plus près en quoi consiste cette stratégie : grâce aux pressions constantes et aux mouvements que le fœtus ressent via le corps et les déplacements de sa mère, il commence à intégrer des informations précieuses pour forger sa future conscience corporelle : il peut ressentir la face antérieure de son corps, la face postérieure, il sent que son corps à une partie supérieure et inférieure, que son corps possède un côté et un autre. Ces sensations constituent des précurseurs quant à la manière dont il va habiter son corps et se mouvoir après sa naissance, à partir des trois dimensions de l’espace (avant/arrière, haut/bas, un côté/l’autre côté). Il engramme des expériences à la fois de connexion et de différenciation. Cela permettra chez le bébé l’apparition des mouvements dits homologues (mouvements en miroir des membres inférieurs ou supérieurs), homolatéraux (mouvements d’un seul côté de la ligne médiane à la fois) et plus tard contra-latéraux (en croisé).

Les mouvements spinaux constituent une base pour l’organisation motrice « en étoile » du fœtus (flexion-extension de la colonne, inclinaison latérale, rotation). Ils se construisent notamment grâce à des réflexes primitifs de la colonne vertébrale tels que le réflexe spinal de Galant, grâce à des réflexes liés à l’oreille interne tels que le réflexe de Moro et le réflexe tonique labyrinthique en flexion (RTLF), grâce à des réflexes du cou tel que le réflexe tonique asymétrique du cou (RTAC)… Parallèlement, les réflexes des extrémités sont utilisés par le fœtus : réflexe d’agrippement palmaire, d’agrippement plantaire, de Babinski, et les réflexes orofaciaux (succion, déglutition, paume-bouche de Babkin…). Le foetus expérimente un modèle de mouvements centre-périphéries, il vit comme une étoile repliée sur elle-même.

La grande glissade

Lors de la naissance, chaque réflexe exercé in-utéro a un rôle précis qui aide le bébé lors de sa progression dans le canal de la naissance ainsi que d’autres réflexes qui apparaissent plus particulièrement à ce moment (spinal de Pérez, positionnement coronal, retournement segmentaire, réflexe tonique labyrinthique en extension -RTLE- à la fin de la naissance…). Cette cascade de réflexes se produit grâce à la communication entre les réactions corporelles physiologiques maternelles et celle du fœtus. Des processus innés, des ajustements, une série d’adaptations mutuelles s’expriment concomitamment dans le corps des deux protagonistes, tout comme c’était le cas durant la période fœtale. Les réflexes actifs durant la naissance par voie périnéale jouent un rôle optimal de faciliteur dans le franchissement des trois détroits du bassin et de régulateur du rythme de la naissance lorsque la femme a la possibilité de se mouvoir librement et de prendre des positions qui permettent à elle et son bébé d’utiliser positivement la gravité.

De l’ombre à la lumière

Après sa naissance, le nouveau-né doit adapter son organisation sensorimotrice dès qu’il est en contact avec l’air et séparé de son placenta. Un nouvel élément, et pas des moindre, s’invite dans la partie : la gravité. La gravité s’applique à tout son corps, en agissant comme un massage global proprioceptif. La stimulation de l’air sur sa peau, ses nouveaux appuis, les caresses de son entourage, les sons et les images du monde extérieur, sont des stimulations sensorielles de formes différentes de celles connues jusqu’à présent. Les réflexes sont toujours actifs et s’exercent de manière appropriée et équilibrée, surtout s’ils ont joué le rôle qu’ils devaient jouer durant la naissance par voie basse. Lorsque ce qui est « imprimé » génétiquement à pu s’exprimer librement durant la naissance, le bébé arrive souvent au monde avec de nombreuses compétences réflexes qui vont l’aider à traiter les nouveaux stimuli pour composer efficacement avec à la gravité. Les rôles des réflexes se transforment à nouveau à ce stade, ils servent au bébé à s’adapter à la pesanteur afin de s’alimenter, bouger/se déplacer et maintenir ses positions, mais aussi s’attacher, communiquer ses besoins, se protéger….

Les six branches de l’étoile

Pour permettre aux réflexes archaïques post-nataux de se manifester de manière équilibrée, le bébé va à nouveau trouver ses ressources dans le déploiement de son corps à partir de son centre. La dénomination d’étoile à 6 branches parfois utilisée pour parler du réflexe de radiation du nombril prend ici tout son sens. Rappelons-nous qu’in-utéro, le fœtus tournait tel une roue autour/à partir de son centre. Après sa naissance, son cadre de référence passe d’une sphère à un axe, un axe pour l’instant horizontal mais plus tard un axe vertical. Auparavant, la structure de la position fœtale induisait la notion de centre, certes, mais pas d’axe du corps de la même manière qu’avec l’ingrédient majeur de la gravité. Pour effectuer cette transition et développer une radiation du nombril harmonieuse dans le monde aérien, le bébé a plusieurs « branchements » à réaliser.

Les deux premières branches de l’étoile sont celles qui doivent s’activer en priorité (voilà cet axe, matérialisé par la colonne vertébrale) : il s’agit de la connexion nombril-tête (bouche) et de la connexion nombril-sacrum (anus), le nombril se trouvant sur cette droite. Nous retrouvons donc bien la connexion des deux orbiculaires à partir de laquelle le fœtus a effectué son développement.

La connexion nombril-bouche est fondamentale, elle permet le transfert énergétique du nombril à la bouche, par laquelle le bébé devra désormais passer pour répondre à ses besoins en nourriture. De cette connexion découle la capacité du bébé à téter, à utiliser les réflexes de son visage pour recevoir du lait, à éveiller petit à petit son réflexe d’alimentation.

La connexion nombril-anus est également cruciale car elle va entraîner la mise en route du système digestif et la capacité à excréter le méconium puis les selles et les urines. Les bébés prématurés ont parfois du mal à trouver leurs repères lors de cette phase et cette première droite mettra plus de temps à s’activer. Le tonus musculaire de ces bébés (entre autres) ne permet pas toujours l’enroulement propice aux sensations de connexions au centre de leur corps.

A partir de cet axe central, les quatre autres branches peuvent alors s’activer : nombril-épaules droite et gauche, nombril-hanches droite et gauche. Quand ce quadrangle du corps (dont le nombril est le carrefour) est « réveillé », le bébé peut progressivement gravir les différentes phases de son développement moteur en utilisant ses réflexes, puis en les faisant maturer jusqu’à leur inhibition (intégration) lorsque les fonctions supérieures du cerveau seront suffisamment développées pour laisser place aux mouvements volontaires.

L’empreinte originelle

Ce processus de développement du bébé s’inscrit dans une continuité d’interactions corporelles avec sa mère, qui comporte trois phases clés : la gestation, la naissance, la période post-natale avec l’allaitement maternel. Pour le bébé, durant ces trois phases, le repère que constitue son centre est primordial pour organiser la conscience de l’unité de son être, sa motricité et probablement l’amorce de son sentiment de sécurité intérieure. L’enfant, relié par son centre à une ancre physique au départ de sa vie a besoin de transférer son port d’attache par un enracinement par la bouche au corps de sa mère, précisément à son sein. Le fait de s’ancrer précocement au sein de sa mère facilite sa transition métabolique entre les deux mondes et lui permet de déployer le rayonnement de son centre en milieu aérien.

Le puzzle

L’approche de l’allaitement instinctif (Biological Nurturing) développée par Suzanne Colson, basée sur l’étude de nombreux couples mère/bébé, met en évidence que l’appui ventral du bébé lorsqu’il tète favorise l’expression des réflexes archaïques qui œuvrent alors comme faciliteurs de la mise en route de l’allaitement. Cela constitue pour lui un point de continuité important entre la vie fœtale et la vie néo-natale. Le bébé, placé sur le corps de sa mère en position ventrale, utilise positivement la gravité pour bouger et prendre le sein. La mère, confortablement installée dans une position semi-inclinée en arrière, offre un large espace d’expérimentations corporelles à son bébé. L’accordage des positions mère/bébé est facilité car les réflexes du bébé sont déclenchés adéquatement par l’interaction des deux corps, par le croisement de leurs regards. En position ventrale, le centre du bébé repose sur le corps de sa mère pendant qu’il transfère son « centre énergétique » à sa bouche. Dans cette position, la gravité s’exerce de manière favorable sur le corps du bébé pour stimuler son axe nombril-bouche/nombril-sacrum. Ainsi, le corps de la mère vient exactement lui fournir les repères et les appuis nécessaires pour l’éveil des deux premières branches de l’étoile : une grande partie de la surface de son visage, parfois même toute, est en contact avec le sein, il bénéficie d’un appui plantaire et souvent du contact de la main de sa mère sous ses fesses.

Je bouge donc je suis

Position d’allaitement classique

Cette forme de contenance lui permet de retrouver les repères stables, équilibrants et rassurants de la vie intra-utérine dans la dimension haut/bas de l’espace. Toute sa face antérieure étant en appui sur le corps de sa mère, il peut également intégrer des informations tactiles qui lui permettent de ressentir la différenciation entre l’avant et l’arrière de son corps. La symétrie positionnelle engendre la possibilité pour le bébé d’effectuer des mouvements périphériques homologues, qui sont présents de manière automatique à ce stade de développement et de stimuler les quatre autres branches de son étoile. Les réflexes des bras/mains(7) et des jambes/pieds(8) peuvent se manifester librement, certains de manière bi-latérale, contrairement à des positions d’allaitement plus « classiques »(9) dans lesquelles le bébé à un seul hémicorps actif à la fois. Il peut bouger ses membres à partir du repère constitué par son axe, ce qui est à la base de la future conscience de sa ligne médiane. Ainsi, le bébé peut se servir de ces cinq points d’accroche (agrippement palmaire bilatéral + agrippement plantaire bilatéral + succion) simultanément si besoin,  ce qui concourt à son sentiment d’équilibre physique et émotionnel pour pouvoir téter plus facilement.

Dans ce qui est décrit ici, le territoire du bébé est délimité très clairement, ce qui fait du lien avec la période fœtale. Le corps de sa mère est un support à l’apprivoisement de la tridimensionnalité. Il est le lieu d’expériences d’autostabilisation positionnelle (expression de réflexes qui permettent au bébé de maintenir sa position au sein)(10) qui pourront évoluer petit à petit vers des mécanismes de stabilité plus élaborés dans différents plans de l’espace. Le bébé est, dès les premiers jours de sa vie, acteur dans sa motricité, guidé par le placement et les ajustements proposés par sa mère.

 

Échafaudages réflexifs

Durant les premiers mois de vie, le bébé présente un réflexe tonique asymétrique du cou (RTAC) actif, qui lui fait prendre une position préférentiellement asymétrique quand il est placé sur le dos (nommée parfois position de l’escrimeur). Ce réflexe, en synergie avec d’autres réflexes(11), a pour rôle la découverte du monde en facilitant la préhension et la manipulation d’objets environnants pour les amener en bouche (première sphère cognitive du bébé). C’est un schème(12) moteur de base pour la coordination oculomotrice ainsi que pour les retournements. Le fœtus a déjà exercé son RTAC in-utéro, et il s’est manifesté avec utilité durant la naissance, de concert avec le réflexe de retournement segmentaire et le réflexe spinal de Galant, lors de la descente en « spirale » dans le canal de la naissance. Le RTAC est donc un réflexe de naissance qui a été fort sollicité, parfois même sur-activé(13) en fonction des conditions de naissance. Certaines naissances surmédicalisées entraînent une manifestation hyperactive du RTAC après la naissance, ce qui peut gêner sa bonne maturation et son inhibition autour de l’âge de six mois (âge auquel le bébé sort de la prédominance du RTAC en accédant aux mouvements controlatéraux).

Quand un bébé né à terme est en bonne santé est placé sur le ventre, il prend une position symétrique « en grenouille », car il est toujours sous l’influence du réflexe tonique labyrinthique en flexion (RTLF). Au bout de quelques semaines, le bébé va développer un réflexe de vie, le réflexe de positionnement abdominal. Quand il se trouve sur le ventre, il tourne sa tête d’un côté, fléchit le bras du côté de la rotation (l’autre bras reste tendu) et présente une flexion de hanche et de genou du même côté. C’est une position antagoniste à celle du RTAC, dans laquelle le bébé étend le bras et dans une certaine mesure la jambe du côté où la tête est tournée et fléchi le côté opposé. J’ai pu observer que l’adoption d’une position ventrale précoce et répétée chez le bébé, sur le corps de sa mère, est un des facteurs qui favorise la bonne maturation du RTAC et l’émergence du réflexe de positionnement abdominal. D’un point de vue du développement moteur, c’est essentiel pour qu’entre quatre et six mois l’enfant accède aux réactions de redressement(14) qui sous-tendent son confort en position ventrale au sol, et aux mécanismes de retournrecevoir le lait plus facilementements, desquels découleront les déplacements controlatéraux de reptation et de quatre pattes(15) et de multiples réactions d’équilibration(16). Cette séquence d’acquisitions motrices s’accompagne de grandes évolutions cognitives et émotionnelles. Toutes ces étapes du développement moteur ont pour origine la structure primaire de la radiation du centre.

Étoile de vie

Lors d’un bilan de la maturation des réflexes archaïques chez l’enfant ou l’adulte (y compris chez des personnes en situation de handicap), les professionnels spécialisés dans ce domaine observent  par des tests simples le branchement du réflexe de radiation du nombril. Quand cette stratégie fondatrice n’est pas en place, nous remarquons toujours la présence de réflexes archaïques résiduels (non inhibés) n’ayant pas pu jouer leur rôle dans le développement moteur. Un des axes de travail est alors de démarrer par un remodelage(17) du réflexe de radiation du centre par le biais de stimulations sensorielles tactiles, en position ventrale, dorsale et debout, par des procédures motrices d’ouverture et de fermeture du corps coordonnées à l’axe et du centre, afin que la personne puisse libérer le potentiel qu’offre une étoile à six branches rayonnante et développer toute une palette de mouvements libres, fluides et maîtrisés. Chez l’enfant et l’adulte, un réflexe de centrage(18) bien présent, donne accès à une stabilité posturale, des déplacements et gestes coordonnées, un sentiment de sécurité intérieure et de confiance en soi, un sentiment d’ancrage, d’enracinement, d’équilibre, d’unité et de conscience corporelle. Il doit rester présent tout au long de la vie(19) pour que l’individu puisse avoir accès à tout âge à un large éventail de mouvements, de réflexions et d’émotions.

Maman brille aussi

Notons que la mère est aussi sous l’influence de sa radiation du centre. Le rapport au corps, la proprioception, le schéma corporel se transforment très rapidement durant la grossesse, ce qui demande à la femme de réorganiser en permanence la connexion à son centre. Un petit être en construction est logé derrière son propre nombril. Après l’enfantement, les repères corporels (et le statut hormonal) se modifient à nouveau soudainement pour la femme et la présence du bébé en son centre peut l’aider à se ré-axer en position d’abord proche de l’horizontal. Elle poursuit son chemin vers la maternité, son enfant non plus en elle mais sur elle, à distance de cordon. Beaucoup de femmes qui restent au repos en gardant leur bébé à cette « adresse » les jours qui suivent la naissance témoignent d’une rapide récupération et d’un démarrage de l’allaitement facilité. Le remaniement physique accompagne leur transformation psychique. La transition bébé intra/extra et la naissance à leur vie de mère semblent être plus douce, peut-être parce qu’elles ont la possibilité de redéployer leur étoile conjointement à leur bébé. Cette période est la suite de l’enchaînement de processus physiologiques synchronisés qui s’est déroulé depuis la période de la grossesse entre le corps de la mère et du bébé.

En résumé, la période de l’allaitement maternel apparaît comme une fondation pour le branchement du réflexe de radiation du nombril, avec un impact positif sur le long terme concernant le développement moteur, cognitif et émotionnel de l’enfant. Grâce à l’ancrage ventral au corps de sa mère, les réflexes s’expriment de manière fluide et organisée et prennent toutes leurs fonctions. Le bébé construit les lettres de son alphabet moteur(20), dont il pourra se servir pour écrire des mots puis des phrases de mouvements de plus en plus élaborées. Durant la mise en route de l’allaitement, l’interaction entre le corps de la mère et du bébé en position ventrale favorise le démarrage de ce processus. On peut se représenter le bébé comme traversant la seconde partie de sa gestation hors de l’utérus, toujours dépendant du corps maternel qui continue à lui fournir ce dont il a besoin. La transition monde aquatique/monde terrestre est adoucie quand le bébé profite d’une stimulation ombilicale, quand il a suffisamment l’occasion de se syntoniser à « l’étoile maternelle ». Il peut profiter de sensations et de repères corporels familiers et réorganiser ses mouvements face à la gravité à partir de son centre. Il retrouve son étoile par l’intermédiaire du corps de sa mère. Tous deux acteurs de leur relation, mère et bébé tissent en corps à corps les débuts de leur histoire d’amour et de lait, de cœur à cœur, d’étoile à étoile, ce qui en fait deux êtres distincts mais à tout jamais reliés.

Ludivine Baubry
Accompagnante et enseignante en Intégration Motrice Primordiale (IMP)
Accompagnante en allaitement instinctif Biological Nurturing.

A Melba, ma fille, qui m’a fait naître mère et qui m’a guidé dans la libération de nos comportements innés, et à son père, Maxime, qui nous a fait confiance et protégé notre allaitement au long cours.

A Paul, mon compagnon et meilleur enseignant du monde, qui m’a fait rencontrer le monde des réflexes archaïques.

A toutes les mamans et leurs bébés que j’accompagne et qui avec leurs mots, leurs gestes, leurs difficultés et leurs victoires me montrent chaque jour à quel point ils savent faire quand on préserve leur environnement.

A Suzanne, pour sa transmission passionnée, qui a mis des mots sur ce que je sentais et observais en théorisant de manière rigoureuse, fiable et humaine, les composants et les mécanismes de l’allaitement instinctif.

(1) L’embryon fait place au fœtus à partir de 11 semaines de vie intra-utérine.
(2) La kinesthésie désigne le sens du mouvement.
(3) Terme utilisé par Svetlana Masgutova pour désigner le fœtus.
(4) La première réaction coordonnée se développe vers 5 à 8 semaines selon les auteurs, il s’agit du réflexe de retrait (parfois appelé réflexe de peur paralysante : RPP)
(5) S. Masgutova a décrit 8 stratégies motrices archétypales : 1-Radiation du centre du corps (flexion/extension tronc-membres) 2-Le mouvement de recherche par la bouche (rotation bouche-colonne) 3-Le mouvement spinal (redressement statique) 4-Flexion/extension latérale du rachis 5-Mouvements homologues 6-Mouvements homolatéraux 7-Mouvements controlatéraux 8-La différenciation motrice (mouvements intentionnels).
(6) La proprioception est la conscience de son corps dans l’espace.
(7) Réflexe d’agrippement palmaire de Robinson, réflexe palmo-mentonnier de Babkin, réflexe de soutien des mains.
(8) Réflexe d’agrippement plantaire, réflexe de Babinski, réflexe d’allongement croisé, réflexe de reptation de Bauer.
(9) Les positions d’allaitement enseignées de manière conventionnelles (madone, madone inversée, « ballon de rugby) sont des positions dans lesquelles la femme est assise verticalement, avec son bébé installé transversalement (angle de 90° entre la mère et le bébé).
(10) Par exemple, le réflexe de Babinski (extension du gros orteil et autres orteils en éventail) qui se déclenche par frottement du pied sur le corps maternel, joue un rôle de propulsion et de stabilisation majeures qui permet au bébé de se maintenir à la bonne hauteur au sein.
(11) Le méta-schème de la mise à la bouche est constitué d’une séquence d’utilisation de plusieurs réflexes : l’orientation cognitive de Pavlov, le RTAC, l’agrippement palmaire, la traction des mains, le paume-bouche de Babkin, les fouissement-succion-déglutition.
(12)Terme utilisé par Piaget, un schème moteur est une structure, un modèle, un patron de mouvement.
(13) Selon les conditions de vie intra-utérine, le déroulé du processus de naissance ou l’environnement de la première année de vie, un réflexe peut être sur ou sous utilisé, ce qui peut impacter sa bonne intégration dans la motricité globale du corps.
(14) A partir de quatre mois, quand le RTLF et le réflexe de Moro ont maturé suffisamment, la réaction de Landau apparaît quand le bébé est en position ventrale. Cette réaction a pour rôle d’activer les muscles extenseurs, le redressement de la tête, la coordination entre le haut et le bas du corps.
(15) Le réflexe tonique asymétrique du cou (RTSC), réflexe transitionnel apparaît aux alentours de six mois et aide le bébé à passer de la position ventrale à la position quadrupédique.
(16) Réflexe de redressement de la tête oculaire et labyrinthique et mécanismes d’équilibrations posturales statiques et dynamiques telles que les réactions de gravité, d’enracinement, d’équilibre décrites par S.Masgutova.
(17) Un remodelage est une procédure sensorimotrice visant à exercer positivement un réflexe dans le but de l’inhiber, de l’intégrer, ce qui permet à la personne de libérer son potentiel moteur, cognitif et émotionnel/relationnel.
(18) Autre nom du réflexe de radiation du nombril utilisé par Svetlana Masgutova
(19) Les réflexes qui restent actifs tout au long de la vie sont appelés réflexes de vie (life long réflexes) par S.Masgutova et réflexes posturaux selon P.Blythe.
(20) Le terme d’alphabet du mouvement a été employé par Bonnie Bainbridge Cohen

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